latin : proscenium, du grec proskênion, de skênê, avant-scène

Le direct, principal atout du live sur Internet

live-indie-(appL’exploitation secondaire du spectacle vivant qui connaît la plus forte croissance sur Internet reste la diffusion de concerts en direct – financée par les marques, le sponsoring et la publicité, ou grâce au paiement à l’acte.

Les festivals de musique sont les premiers à avoir embrassé ce procédé du « livestream ». En 2012, le festival américain Coachella a accueilli 80 000 festivaliers, mais c’est plus de 4 millions de personnes qui sont venues suivre sur Internet, à un moment ou à un autre, la retransmission en direct des concerts programmés. Champion toute catégorie, le festival Bonnaroo – en diffusant les prestations d’artistes comme Paul McCartney, ZZ Top ou Jack Johnson sur la plateforme Ustream, en qualité HD et en multi-caméra – a attiré 11 millions d’internautes venus suivre le livestream de son édition 2013.

La même année, plus d’une centaine de festivals ont opté pour le livestream de leur programmation. En France, les Eurockéennes, Main Square, Calvi on the Rock, le Hellfest ou La Villette Sonique ont retransmis tout ou partie de leur édition 2014 sur le site CultureBox de France Télévisions ou sur celui d’Arte Concert, tout comme La Route du Rock, Rock en Seine ou les Francofolies. Lors du démarrage de sa tournée des festivals européens en 2014, à l’occasion du festival Primavera Sound de Barcelone, Arte Concert a programmé trois nuits de livestream de plus de 40 concerts – d’Arcade Fire, des Pixies, de Metronomy… – et battu un record d’audience, avec plus de 200 000 « livestreamers » venus se connecter pendant le week-end.

Un réflexe de captation

De plus en plus d’artistes ont pris le parti de diffuser eux mêmes un certain nombre de leurs concerts en direct tous les ans, à l’instar des vétérans américains de Phish ou du groupe Widespread Panic, qui disposent de leur propre plateforme de diffusion aux Etats-Unis. Dans l’univers du classique, le Philamornique de Berlin retransmet en direct une trentaine de concerts par an sur son site Digital Concert Hall. Plusieurs formules d’abonnement permettent d’accéder aux directs et à toutes les archives. En France, la Philarmonie de Paris (ex-Cité de la musique) a entamé depuis deux ans une politique de captation de ses concerts avec retransmission en direct sur internet, ou dans le cadre de coproductions avec des chaînes de télévision comme France 2, France 3 ou Mezzo. Plus de 200 extraits et captations intégrales de concerts (enregistrées à la Salle Pleyel ou à l’ex-Cité de la Musique) sont disponibles sur le site de la Philarmonie de Paris, dans une archive de plus de 100 heures de musique live. 40 nouveaux concerts sont diffusés en direct chaque année. Leurs captations intégrales restent disponibles pendant deux mois.

Les sources de diffusion de musique live en direct sur Internet se multiplient. En 2013, le portal américain iRocke, qui référence tous les « livestreams » de concerts programmés sur la toile, en a dénombré plus de 1000, qui ont diffusé 20 000 concerts de plus de 8000 artistes, et touché quelques 380 millions de personnes. « Le nombre de concerts diffusés a augmenté de 43 % sur un an, le nombre d’artistes qui font du livestream de 53 %, et le nombre de plateformes de diffusion de musique live de 36 % », constatait iRocke dans un communiqué. « Il suffit de réaliser que tous les artistes peuvent diffuser directement leurs concerts sur Internet aujourd’hui pour comprendre que le monde du live est en train de changer du tout au tout. […] C’est la plus grande disruption que connaîtra l’industrie du live depuis les phénomènes de concentration qui se sont produits au cours des années 90, dans la promotion de concerts, la billetterie ou les réseaux de salles », prédit Karl Rogers, co-fondateur du portail iRocke.

En quête de réseaux de distribution

Reste à trouver de nouveaux débouchés en terme de distribution, comme la retransmission de concerts en direct dans les salles de cinéma. Expérience lancée aux États-Unis, elle est proposée par de plus en plus de salles obscures en France, pour la retransmission de spectacles de variété, de musique ou d’humour. Celle, en différé, du concert lyonnais de Mylène Farmer lors de sa dernière tournée Timeless, dans 230 salles de cinéma, a ainsi réalisé plus de 100 000 entrées, pointe l’IDATE dans une étude Spectacle & Numérique réalisée pour le Prodiss ; et celle, en direct, d’un spectacle de Florence Foresti dans 250 salles, en a enregistré 81 000.

La sauce est en train de prendre. Le concert symphonique donné par Patrick Bruel au Palais Garnier à Paris, en février 2015, a été filmé pour une rediffusion quelques semaines plus tard dans des dizaines de salles de cinéma un peu partout en France. Après huit concerts au Grand Rex tous complets, l’héroïne et chanteuse labellisée « Disney » Violetta a vu son spectacle diffusé dans 150 salles à l’automne 2014. Un an plus tôt, c’est le concert des Rolling Stones à Hyde Park qui était filmé pour une rediffusion, après post-production, dans quelques 80 salles obscures en France. Qu’ils soient Français – comme Jean-Louis Aubert, M Pokora et Shy’m – ou Anglo-saxons – comme Coldplay et Muse -, de nombreux artistes se lancent dans l’aventure.

D’autres réseaux que celui des salles de cinéma sont susceptibles d’émerger, mieux dimensionnés pour supporter les scènes locales ou les artistes indépendants et émergents : comme celui des bars musicaux, et autres établissements équipés pour retransmettre des événements sportifs sur grand écran. Toute politique de soutien à l’équipement des salles de concert en dispositifs de captation et de livestream, avant qu’un véritable modèle économique n’émerge, sera déterminante pour structurer un véritable marché ; de même que la résolution d’un certain nombre de conflits de revendication sur les droits voisins de la musique live enregistrée.

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